Belles histoires / Extraits
Matelot en Indochine
- Jacques Fortin
En 1949,
j’étais matelot en Indochine et embarqué sur un
petit bateau de débarquement affecté à la
flottille amphibie Indochine Sud. Lorsque nous
partions en « secteur », c’était pour plusieurs
mois. Nous devions durant cette mission,
naviguer sur le Mékong et ses affluents dans
tout le delta.
Nous étions basés à Chaudoc, dernière ville du
Vietnam avant le Cambodge. La garnison, outre la
DNA 2 (Division Navale d’Assaut), comprenait une
compagnie de tirailleurs de l’infanterie de
marine. Nos missions étaient variées, du
transport de troupes aux patrouilles de nuit sur
le fleuve, etc.
Matelot timonier sur le L.C.T. 696, mes
fonctions me laissant du temps libre, le Pacha
me confia la tâche de vaguemestre et de commis
aux vivres, ce qui me permettait de me balader
en jeep, avec le vaguemestre des « biffins ».
Au retour de Saigon, après une de ces escapades
durant laquelle j’avais acheté « Ici Paris », je
proposai à l’équipage d’insérer une annonce sous
la rubrique « Marraines et Filleuls ». Il faut
dire que le temps nous paraissait long parfois,
et tout était bon pour trouver des distractions,
hélas fort rares dans notre petit patelin.
Accord unanime !
Voilà le texte que nous adressions à la rubrique
en ce mois de novembre 1949 :
« Exilés en Cochinchine, les 13 intrépides
matafs du L. C. T. 696, souhaitent marraines de
guerre âgées de 18 à 35 ans, joindre photos,
réponses assurées. Écrire, matelot timonier
etc. »
Le
succès de notre annonce fut surprenant : 70
jeunes filles écrivirent à notre bande de
joyeux drilles ! Le fait d’avoir donné une
adresse pour la réponse nous valut, paraît-il,
ce grand triomphe !
Il fallut procéder à la répartition. Tandis que
le plus jeune tournait le dos, il était
questionné : - « pour qui celle-ci ? »
- « Pour untel ! », etc.
De cinq à six « postulantes » furent ainsi
attribuées à nos lascars ravis. Les « gredins »
avaient pensé qu’à l’approche des fêtes de fin
d’année, il serait bon d’avoir des marraines...
Pourtant il restait la lettre de deux
candidates, contenant deux photos : celle d’une
brune et celle d’une blonde. À cette époque,
j’étais très copain avec un matelot mécano,
originaire de la région et bien entendu, le
distributeur attribua les deux inséparables
filles aux deux inséparables garçons...
- « Laquelle veux-tu ? » me demanda Robert.
- « La blonde ! »
- « Zut, moi aussi ! » répliqua mon copain.
Nous décidâmes de tirer à pile ou face !
Et c’est moi qui gagnais le droit d’écrire à la
belle blonde... Colette !
Dix-huit mois passèrent, durant lesquels,
j’abandonnai tout courrier avec les autres
correspondantes, tandis que notre échange
devenait plus intime.
Retour à Toulon avec le « Duguay-Trouin », avant
d’aller à Caen, où résident mes parents, je file
sur Bordeaux, faire enfin la connaissance de
celle que je devais épouser six mois après la
fin de la campagne en Indochine.
Affecté à Cherbourg sur le « Mammouth », mon
épouse, elle, était venue habiter à Caen, ville
où j’avais prévu de me retirer dès ma
démobilisation. Cela nous permettait de nous
voir presque toutes les fins de semaine.
Et bien
des années après, lorsque nous n’étions pas
toujours d’accord (souvent à cause de nos quatre
enfants), il m’arrivait de lui dire, exaspéré :
- « Si la pièce avait pu tomber de l’autre
côté ! ».
Cela se terminait dans un grand éclat de rire !
Alors ?
C’est plus romantique que de se rencontrer au
bal ! Pas vrai ?
-
Source Web |
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Marins en kaki
Paul J. CARNASSES
Premier-maître mécanicien (H)
Chevalier de la Légion d'Honneur (faits de
guerre)
Ancien de la Résistance, des combats de la
Libération, des flottilles fluviales de fusiliers marins, des
Dinassauts, de la DBFM
Brevet : parachutiste
Certificats : amphibie, chaufferie,
fusilier motoriste, sous-marinier (opération Suez 1956, sous-marin
"La Créole")
En tous temps, en tous lieux, les marins ont
pris une part très active aux interventions à terre tant en France
qu'outre-mer.
En Indochine, nous étions pour tous "la
Marine en kaki" ; pour les biffins, les paras, la Légion, nous
étions "les chie dans l'eau".
Ces unités comme toutes les unités dans la
Marine à terre étaient constituées d'éléments de toutes les
spécialités existant à l'époque. Seuls les commandos Marine
l'étaient à 98% de fusiliers commandos.
La guerre d'Indochine a eu le terrible
mérite de ne ressembler à aucune autre.
La guérilla, les embûches diverses, la ruse
étaient les états permanents de cette lutte et on pouvait
s'interroger sur la nécessité et l'efficacité d'une force de
plusieurs milliers de marins en Extrême-Orient.
Y aurait-il donc eu une marine de guerre
viet-minh ?
Bien sûr, elle n'existait pas, mais nous
allons regarder la carte... l'étudier plutôt, et à ce moment-là
seulement nous comprendrons que la marine française a eu de grandes
responsabilités en Indochine. Les 2.000 km de côtes et les deux
immenses deltas, celui du Fleuve Ruge au nord et celui du Mékong au
sud nécessitaient une présence "Marine". Ces deux deltas sont la vie
du pays et, de ce fait même, faisaient l'objet de la convoitise du
Viet-Minh.
Avec les innombrables ramifications de
leurs fleuves augmentés de canaux creusés de main d'homme, ils sont
également de gigantesques éponges.
De plus, l'eau est l'élément de circulation
naturel et pour se mouvoir sur l'eau, il n'est encore rien de mieux
que des bateaux.
Pour toutes ces raisons, la "Marine
nationale" était en Indochine et avait participé brillamment à
toutes les opérations dans cette région du monde depuis la conquête
jusqu'à la fin des opérations en 1954.
Après 1945, des unités spécifiques opérant
sur les fleuves et arroyos furent crées sous des noms divers :
flottilles fluviales des fusiliers marins, flottilles amphibies du
Nord et du Sud, divisions navales d'assaut et commandos marine.
Toutes ces unités ont maintenu très haut le prestige de la Royale.
Sans ces bateaux, le commandement terrestre aurait éprouvé de
sérieuses difficultés pour porter ses compagnies en zone rebelle, de
l'autre côté des fleuves, au fond des rachs étroits dont les berges
couvertes de palétuviers ou de palmiers d'eau masquaient parfois de
cruels obstacles.
Parmi les risques
spécifiques des opérations maritimes en Cochinchine et au Tonkin, il
faut aussi mentionner les mines artisanales utilisées par le
Viet-Minh sur tous les fleuves, rachs, arroyos ou giongs. Mouillées
la nuit en toute tranquillité, par un plongeur silencieux et son
bambou, avec un fil de mise à feu d'une centaine de mètres au
minimum, qu'un seul veilleur pouvait actionner lorsqu'un bâtiment se
présentait dans la ligne de visée.
Outre quelques LCM, LCVP, chalands
cuirassés, les dragueurs de mines "Glycine" et "Myosotis", les LSIL
9030, LCI 9049 (ex USN 262) et quelques autres dont j'ai oublié le
nom ou le numéro furent envoyés par le fond. En ce qui concerne les
dragueurs, il n'y eut que peu ou pas de survivants.
Tant sur les fleuves du Tonkin que sur ceux
de la Cochinchine, les patrouilles constantes, les reconnaissances
et les appuis donnés aux postes souvent isolés en pays rebelle
étaient de la plus grande utilité.
Les secteurs attribués étaient très étendus
et les unités qui remontaient les fleuves Vaico à la limite de la
plaine des Joncs, par exemple, jouissaient certes d'une grande
indépendance, mais comme leurs soeurs des régions éloignées du
Tonkin, elles étaient en constant état d'alerte.
Si la vie en Dinassaut était
particulièrement fatigante et inconfortable pour le personnel et le
matériel, parés à agir dans les plus brefs délais, elle était du
moins passionnante. On manquait de place et d'installations
matérielles, mais à tous les échelons du commandement une large
place était faite et laissée à l'initiative individuelle (les
affectations étaient de 18 mois).
On demandait beaucoup à chacun et des
décisions rapides et souvent graves étaient prises par les chefs de
dix-neuf à vingt-cinq ans (jeunes officiers issus de l'Ecole Navale,
jeunes officiers de réserve, officiers mariniers de toutes
spécialités, parfois même quartiers-maîtres de 1ère ou de 2ème
classe).
Les plus illustres d'entre eux ont accédé
aux plus hauts grades de la hiérarchie des armées et nous nous en
réjouissons sincèrement :
- l'amiral P. Lacoste, ancien directeur général de la DGSE, a
commandé en ant que jeune EV1 les LCT 799 et 1104 au sein des
Dinassaut de Cochinchine en 1948-1949. Pacha remarquable à tos
points de vue, très coté tant chez les marins que chez les biffins.
- l'amiral B. Louzeau, actuel chef d'Etat-major de la Marine,
a brillamment commandé en son temps comme jeune EV1 la section
d'assaut de Phnom-Penh, le LCM 49 à Mytho, le groupe LCM (5) de Hué
en Annam.
- le vice-amiral d'escadre A. Coatanea, ancien major général
des armées, jeune enseigne de vaisseau de 20 ans a commandé par
intérim en 1953 et 1954, le LCI 9047 des Forces Fluviales du Fleuve
Rouge (en remplacement d'un capitaine de frégate ou d'un capitaine
de corvette). Il fut blessé à bord le 14 février 1954 après s'être
particulièrement distingué lors des opérations menées sur le Moyen
Fleuve Rouge à Yung-You. Malgré sa blessure et tout en continuant à
diriger le bâtiment et le feu des pièces du bord, il prit le temps e
faire un garrot (avec ses lacets de souliers) au commandant de la
Dinassaut 12, e capitaine de corvette Marcel Garnier très grièvement
blessé au cours de l'action.
L'embuscade, ce jour-là était du type de
celles que rencontraient fréquemment les Dinassauts ou les forces
fluviales au Tonkin. Quelques kilomètres de fleuve à franchir pour
des engins relativement lents pendant que pilonnaient mortiers,
mitrailleuses lourdes et canons sans recul enterrés et camouflés
dans les digues et diguettes du fleuve (compagnies lourdes du
régiment régional TD 42 qui, tel un "phénix", renaissait toujours
dans le delta malgré des opérations incessantes...)
Après cela, il eut deux commandements
opérationnels de LCT au Tonkin et en Cochinchine.
- Le plus illustre d'entre tous (onze fois cité au combat),
commandeur de la Légion d'Honneur depuis le 19 février 1954
(2 fois cité en Algérie) est aujourd'hui un paisible retraité, père
de famille nombreuse dans les Hautes Alpes. Je veux parler du
capitaine de vaisseau (H) M. Garnier, ancien commandant des
engins d'assaut à Nam-Dinh en 1947 et des 3ème et 12ème Divisions
Navales d'assaut sur le Fleuve Rouge 1947-1948 et 1953-1954.
Les bateaux utilisés pour des opérations
militaires dans ces deltas devaient donc remplir certaines
conditions : puissance des moteurs suffisante pour pouvoir naviguer
au moment des crues avec des courants atteignant 5 à 6 noeuds,
tirant d'eau faible. Ils devaient, en outre, posséder un armement
assez important et une protection efficace.
Ces conditions se trouvaient justement
remplies par es engins que les Américains et les Anglais avaient
construits à partir de 1942 et utilisés lors de la guerre du
Pacifique et des débarquements en France.
En fait, ils avaient servi à débarquer le
personnel, les chars et le matériel lors des débarquements sur les
îles, après une intense préparation d'artillerie. Le fait qu'ils
devaient s'échouer sur un rivage avait conduit à avoir des fonds
plats et des rampes de débarquement. Engins divers récupérés en
France après l'armistice du 8 mai 1945 ou achetés aux Philippines et
en Malaisie. Bon nombre d'entre nous sont allés en chercher (échoués
sur les plages et dans un triste état) à Manille et à Singapour.
Quelques années plus tard, les diverses commissions de l'US Navy,
venues en Indochine à divers titres, s'émerveillaient des
modifications apportées à ces engins pour la guerre sur les fleuves
et arroyos et, aussi, de leur bon état général coques et machines
(alors que peinture et rechanges divers nous étaient chichement
comptés).
Pour la petite histoire, je vous dirai que
j'ai obtenu pour nos moteurs GM bon nombre de pièces en excellent
état chez des amis de l'armée de terre (connus auparavant dans la
Résistance lors des combats de la Libération, ou compatriotes
pyrénéens).
Les mêmes moteurs Diesel GM 6-71 de la
General Motors équipaient les chars moyens M3A3, M3A5, M4A2
(régiments de spahis et de cuirassiers). Hors service à divers
titres, pendant nos escales à Hanoï, Haïphong, Nam-Dinh, nous en
avons cannibalisé les équipements électriques et les moteurs,
constituant ainsi un bon stock de rechanges à bord pour maintenir en
état les engins de toutes les armées qui nous demandaient assistance
et interventions diverses sur les fleuves et arroyos lors des
grandes opérations. En sus des Dinassauts, nos camarades de la Légon
Etangère, de la Gendarmerie d'outre-mer, du Train et du RICM avaient
aussi leurs petites flottilles, bien étoffées pour certains.
De 1947 à 1954, au cours de mes séjours en
Indochine, j'ai servi, tour à tour, sur tous les types d'engins :
LCVP, LCM, LCT, LCI et VP.
Je n'en décrirai sommairement qu'un seul :
le LCI 9047 (ex USN 251) dont j'ai été le chef mécanicien (maître
chargé machines, électricité, sécurité, radio) de 1952 à 1954 :
- longueur : 48,30 m.
- tirant d'eau maxi : 1,75 m.
- déplacement : 275 t. (à pleine charge).
- propulsion 2 moteurs Diesel / 2 hélices à
pas variable.
- puissance : 1600 cv. (800 par ligne
d'arbre) + 2 GE + 2 moteurs au treuils (AV et AR).
- armement : 1 canon de 40 mm à l'avant, A1
canon de 75 guerre sur Spardeck, 4 canons de 20 mm (2 à l'arrière, 2
sur le Spardeck), 2 mitrailleuses de 7,62 mm à la passerelle, 1
mortier de 81 mm à l'arrière, 2 affûts spéciaux lance-grenades VB de
4 grenades à fusil (Mas 36) par affût (protection du plan d'eau lors
des mouillages opérationnels), montés sur axes pivotants et avec
masques de blindages sur le Spardeck (expérimentés en 1953,
1954...).
- 30 à 32 hommes d'équipage + l'état-major
et les détachements légers opérationnels (appui d'artillerie).
Sur tous les champs de bataille où elle a
été engagée, la Marine a combattu avec un magnifique esprit
d'initiative et de sacrifice, et les maris ont toujours montré les
plus belles qualités de volonté, d'allant et e courage qui ont fait
honneur à la Marine toute entière.
A mes camarades féminins et masculins de
tous grades, de toutes spécialités en activité en ce deuxième
semestre 89, je voudrais dire : nous comptons sur vous pour assurer
la pérennité de cet état d'esprit : soyez des militaires et des
maris au vrai sens des termes, avant d'être des spécialistes de haut
niveau.
Pour n'évoquer que les derniers conflits,
je voudrais ajouter à l'attention de tous nos camarades féminins et
masculins en activité que la Marine Nationale a eu :
- en Indochine de 1946 à 1954 : 301 tués
métropolitains dont 27 officiers e environ 700 blessés, toutes
unités confondues.
- en Algérie de 1956 à 1962 : 227 tués
(dont 197 pour la DBFM et 30 pour les commandos) et 331 blessés
(dont 254 pour la DBFM et 77 pour les commandos).
Ceci sans compter tous ceux tombés en
service commandé en temps de paix : sous-mariniers, fusiliers
marins, commandos, aéronavale, etc. dont le nombre total réel vous
surprendrait, je n'en doute pas.
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Les conflits : La guerre d' Indochine
Les Divisions Navales
d'Assaut
Note de l’auteur : Les lignes ci-dessous m’ont été
inspirées par le livre du capitaine de corvette de BROSSARD qui m’a
fait l’insigne honneur de préfacer « Radieuse Aurore » mon livre sur
les « saccos » de la DBFM. Les illustrations des engins mis en
œuvre sont extraites de son livre paru aux Editions France Empire en
1952, et toujours disponible. LHG
Autre publication de l'auteur :
Radieuse Aurore
LH GALEA : fusilier
marin de la BDFM
A l’avant du 217, les deux matelots gabiers, à l’aide d’une sonde
en bambou « chantent » le fond : 1 mètre 90, 2 mètres, 2mètres10…
Ils sont à Cua-Van-Uc, un sale coin. Le chenal est
balisé par cinq bouées : il en manque toujours une ou deux et il
faut faire très attention pour ne pas se mettre au sec, échapper au
« makui » des fleuves. Le 217 de la première Dinassaut est en
opération de nuit. Les moteurs ont été stoppés et le vacarme des
crapauds buffles est assourdissant.
Exemple parfait de coopération intime entre
l’armée de terre et la marine
Les Dinassaut (Divisions Navales d’Assaut) ont été créées par le Roi
Jean (général de Lattre de Tassigny), dans les années 1950, en
puisant dans les effectifs de la B.M.O.E. Les officiers et les
équipages sont nouveaux ; seuls les sous-officiers sont des anciens
qui ont déjà baroudé en Europe au sein des FFL, au RBFM ou au 1er
RFM. Ces Dinassaut, héritières des barcasses du commandant KILIAN et
de ses fusiliers marins qui dégagèrent Saïgon en décembre 1945, vont
se constituer avec des moyens plus puissants et mieux adaptés à ce
pays où tout se transporte par voie d’eau. Elles reçoivent des LCA,
LCVP, LCT, LCM et des vedettes FOM. Ces vedettes ne sont pas armées
par des marins, mais par des soldats de l’armée de terre.
En fait, les Dinassaut sont un exemple parfait de coopération intime
entre l’armée de terre et la marine. Le marin et le fantassin vivent
l’un pour l’autre. Jamais, sur aucun autre théâtre d’opérations, le
sort des marins et des soldats n’aura été aussi étroitement et aussi
durablement lié.
L’idée principale est de débarquer à l’improviste sur renseignement
des compagnies de supplétifs vietnamiens, des légionnaires, des
commandos de toutes armes. L’objectif est d’éradiquer les postes de
tir que les Viets ont installés afin de barrer la libre circulation
de nos bâtiments et laisser la place libre à leurs jonques de charge
qui ont pour mission de collecter le riz dans le delta riche. Les
Dinassaut bouclent la circulation sur les rach et les arroyos et
empêchent les Viets d’échapper aux opérations terrestres montées par
l’état major, qui arrivent à les coincer en bordure de rivière.
Ces engins de débarquement à fond plat et de faible tirant d’eau,
sont parfaits pour le type de missions auxquels on les destine.
Leurs équipages proviennent de toutes les spécialités de marine,
tels que mécaniciens, radios, timoniers, manœuvriers, secrétaires,
fusiliers, canonniers et torpilleurs. Ils se sont tous très bien
adaptés à cette vie de romanichels où le danger, la chaleur,
l’humidité constante, les maladies tropicales, l’inconfort et le
danger sont permanents. Le LCM porte en général la marque du
commandant de division, un triangle tricolore pour les capitaines de
corvette ou de frégate.
CAM BAO
« J’aimerais bien débarquer à Cam Bao et revenir avec
quelques armes ! On ne sait jamais … »
Trois LCM, trois LCVP, et le LCI qui ferme la marche descendent le
Fleuve Rouge et vont passer devant Cam Bao, village réputé
dangereux, en zone ennemie.
Dans la « cuve » des trois LCM, les commandos supplétifs vietnamiens
ayant pour indicatif « MATOU », attendent de débarquer pour se
donner de l’air.
Le pacha, debout sur le toit de la passerelle, fouille avec ses
jumelles les remparts crénelés. Il repère des têtes qui apparaissent
et disparaissent rapidement. Puis, dans ses jumelles, apparaît une
tête coiffée d’un casque verdâtre; un régulier. Il se fixe sur ce
type et ne quitte pas des yeux la digue qui se rapproche rapidement.
Le LCM entame son approche pour « beacher » lorsque le pacha voit le
type au casque basculer dans sa direction un tube de bazooka. Il se
dirige tranquillement vers le canon de 20 babord et le désigne au
tireur.
En deux rafales son compte est réglé. D’autres casques se montrent
et rafalent le LCM de tête qui défile à 20 mètres de la berge. Ça
sent le traquenard; débarquement annulé. En un instant la bagarre
devient générale, ça fuse de tous les côtés, les traceuses voltigent
dans les deux sens. Ça sonne sur les blindages, le 75 du LCI allume
les positions d’armes lourdes. Le matelot DUPRAT, une balle dans la
mâchoire perd son sang en abondance, Le cuisinier qui sert le 20 de
bâbord est touché ainsi qu’un sergent annamite. Le matelot LOCHON
est criblé d’éclats.
CHARBONNEL, matelot timonier, entre deux messages, le casque radio
sur la tête, manie avec dextérité un fusil-mitrailleur.
Sept kilomètres sous le feu ininterrompu des réguliers qui avaient
monté une belle embuscade. Le pacha a eu le nez creux d’annuler son
opération terrestre.
A DAP-CAU, les blessés sont évacués vers Hanoï grâce à l’aide active
des soldats du génie et du 1er chasseurs.
Le sergent ne survivra pas à sa blessure. Il avait mérité déjà deux
citations avant que cette dernière croix de guerre vienne s’épingler
sur le coussin au pied de son cercueil.
Les autres blessés survivront.
LHG
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